Transcender la bête immonde

La question est en quelque sorte interdite, puisqu’une réponse négative qui lui serait faite justifierait, en principe, les pires exactions.

Mais qu’en est-il réellement ?  Posons-la toujours, cette question :

― Est-ce encore humain d’agir ainsi ?  

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Le paradoxe de la tolérance, d’après Karl Popper

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Comme il y a une limite à tolérer l’intolérance, il y a aussi une limite à se prétendre frère. Car non, cela n’est plus humain de traiter ainsi l’humain. Qui agit ainsi se reconnaîtra ; mais, pour être tout à fait clair, par ainsi on entend une manière d’exaction tant effarouchée du mot vrai qui la caractérise qu’elle accuse, par inverSionisme, d’exaction latente ou alléguée quiconque la critiquerait. — Un minable et peureux procès d’intention de bébé gâté qui en mérite un vrai de vrai, de procès !

Car, si cela est encore humain, sa place est en prison.

L’humanité sera confraternelle — ou ne sera pas.

On sera du moins jugés, à l’aune de cette confraternité.

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Alors, repentez-vous !  Et allez y donc, mais en votre propre esprit, faire des places nettes et des conquêtes — et qu’en courageuse paix vous vous résolviez, si vous le pouvez !

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Mais aussi que l’horreur fratricide ne nous gagne pas nous aussi, et ne nous conduise pas à haïr à notre tour, à devenir bêtes inhumaines ; gardons froid notre sang et reprenons nos esprits !  Il n’est que trop facile de rester comme fascinés, terrifiés, enragés, éplorés jusqu’à la transcendance. ― Reprenons le vital et l’essentiel ; opposons à la bête une face humaine !

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S’arrêter là serait cependant une farce tragique, car il faut aussi agir : se recomposer d’abord, oui, faire face au principe de réalité ; puis s’y retrouver, ne vous en déplaise ; et, de là, tisser, échanger, changer ; créer l’humanité — qui risque autrement de devenir un creux et caduque concept à force d’être répété, imploré, exhorté, exigé et souligné . . . sans véritable succès.

Reprenons donc notre souffle et notre ampleur — celle de nos rêves et de notre harmonie ; celle de notre amour de la vie et de notre courage à la défendre.  Et on sera alors unis, UN. Non pas obnubilés par les frasques d’untel, ou par l’héroïsme messianique d’un autre qui prendrait tout le plancher, toute la gloire et tous les droits — non !  

La venue qui est là déjà — mais qui tarde à s’accomplir, toute engoncée elle-même dans son idéologie guerrière — est la confraternité réelle qui, bien sûr reconnaît sa diversité, ses différences et ses couleurs ; et qui passe à un autre niveau, dans un règne béni, compréhensif, englobant.

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À ne mettre l’attention que sur la bête horrible, on perd son centre, sa finalité, même sa vitalité. Car il peut être désespérant de voir tout ce qui ne se fait pas pour contrer l’immonde . . . et désespérer — mais nous nous mettons en cela à ressembler à la bête, faite de peur et de rage.

Ne la perdons pas de vue, la bête ; elle rôde et règne dans sa fureur immonde — mais n’oublions pas cette intuition que nous sommes, que nous faisons partie d’un nombre immense qui tous et toutes font aussi partie de cette équipe — encore ensommeillée mais qui se réveille et tend le cœur et l’oreille, incrédule, au rapport de ceux qui, vaillants, n’ont pas fermé l’œil. 

N’est-il pas suprêmement important d’être ainsi vitalisés, connectés, mis au défi du réel ?  Non uniquement pour lutter et dénoncer — mais déjà pour vivre, tout simplement ?

De l’idée à l’action, il y a souvent un gouffre, mais il est facilement franchissable, en cette époque divisée, par rapport à celui que doit franchir l’apport unique de notre être au monde pour rejoindre sa compagnie : du un au plusieurs vécu, d’humains à humains, dans le concret nécessaire à tout réel changement de paradigme. 

Mais n’oublions pas qu’en notre humanité nous sommes reliés déjà, et plus grands (ô combien !) que l’humain isolé — dans notre divine humanité par son intuition révélée : multiplicité réunie, oreilles et oreillettes dressées, vibrées — ouvertes à plus que l’idée.

Nous sommes déjà une majorité, une majorité grandissante et flamboyante dans nos cœurs meurtris, explosés dans une transcendance de compassion qui voudrait tant agir. — Eh bien, c’est cela l’humanité digne de ce nom : Vivons-la ! (En moins explosés, si possible.)

Battons un rythme aimant, joyeux ; bâtissons, à l’unisson, un monde digne de ce nom ! — Et si nous en mourons, au moins, nous mourrons vivants, ce qui est encourageant pour la suite.

À l’action !  À nous !  Faisons don’ l’humanité !

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