Cet opus, comprenant maintenant 400 pages, incluant un index extensif, est un recueil de morceaux qui évoquent — et même invoquent — une ère proprement communicationnelle. Il m’a pris, à un rythme mi-fougueux mi-paresseux, cinq bonnes années à rassembler, compléter et peaufiner — mais c’est en fait une œuvre de bien plus longue haleine qui y est évoquée, rassemblée, revisitée et relancée vers l’avenir. D’abord une vision, puis mes essais, plans et états d’esprit dans le processus de parvenir . . . à la communiquer — enfin ?
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La composition du recueil est celle d’un délicat assemblage de pensées plus ou moins philosophiques, de fables (souvent humoristiques), d’inventions, de clins d’œil et de dessins de mon cru, ainsi que de quelques citations choisies qui montrent que je suis loin d’être le seul à marcher sur ces sentiers d’un monde possible où la communication est prise au sérieux et utilisée intelligemment.
Je publie ci-dessous l’ensemble de l’œuvre d’un trait, mais mon objectif à long terme est de la découper en ses parties constituantes et de rendre ces constellations — et les vôtres — navigables via des outils d’organisation des idées que je rendrai disponibles ici même, sur LaTramice.net.
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Avant de sauter aux petites modalités d’usage et à l’œuvre elle-même, livrée pour vous en format PDF, je vous invite à jeter un œil à la quatrième de couverture qui en révèle un peu la teneur :
L’ère communicationnelle n’arrivera pleinement que lorsque, à grande échelle, par-delà les frontières nationales, nous utiliserons la communication de manière intelligente afin de tisser tout ce qui est social à partir de nos interactions interindividuelles, et non plus en nous plaçant systématiquement sous des institutions ou des chefs qui nous dirigent et dictent à notre place ce qu’est « la réalité » et « comment les choses fonctionnent ». Cette ère aurait pu en fait commencer bien avant la venue de l’internet, bien avant l’apparition du télégraphe (c’était il y a dix minutes, en termes d’ère) et même bien avant l’invention de l’écriture, la parole suffisant en principe amplement à son processus. Mais il aura fallu, semble-t-il, que nous communiquions comme jamais auparavant, ce qu’auront facilité la Toile et les médias sociaux, pour nous rendre compte, collectivement, de notre erreur originelle : celle de nous en être remis à la force brute — ou à son abstraction représentative — et de lui avoir abandonné notre pouvoir propre de création, d’aménagement et d’interprétation du réel.
Vous avez ma bénédiction pour distribuer intégralement (sans altérations ni rajouts) SIGRATUITEMENT (i.e. sans les vendre) l’une ou l’autre des versions de l’œuvre, visionnables ci-dessous. Prière alors de me contacter afin d’obtenir un format convenant mieux à l’impression. Et aussi pour que j’aie une petite idée de l’engouement que mon œuvre suscite.
Ma bénédiction également pour en citer des passages inaltérés de trente lignes ou moins avec mention de l’auteur (Frédo), du titre de l’œuvre (La machine à souhaits) et, si vous le souhaitez, de sa plateforme officielle :
Une version imprimée peut être commandée sur LaTramice.net.
Je suis également ouvert à présenter mon livre à des groupes qui m’en feront la demande.
Si en plus vous me promettez de le laisser à résidence dans le local étudiant de votre département (ou de celui d’un.e de vos camarades), je vous donne un exemplaire gratuit.
3903 rue Saint-Denis, Appt. 22 Montréal (Québec) H2W 2M4
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~ L’œuvre ~
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~ AVERTISSEMENT ~
Certains passages de la versionintégrale de La machine à souhaits pourraient être vus par certaines personnes comme impropres à la lecture pour un public de moins de . . . 13 . . . ou peut-être de moins de 18 ans ? Moi je me demande s’il est nécessaire du tout de mettre une limite, mais je ne prends pas de chance et préfère t’en avertir :
Hot stuff in there !
^^ Chaud devant ! Chaude littérature ! ^^
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Demande à papa ou maman si tu peux
appuyer sur l’hyperlien ci-dessous :
NOTE : Ce texte a été publié sur Facebook par une personne qui a omis d'en mentionner l'auteur⸱e, que, malgré mes recherches, je n'arrive pas à retrouver. Si vous pouvez remédier à cette lacune, SVP, écrivez-nous à : lÉquipe@LaTramice.net ! — Merci !
Fred Lemire
Une astuce que je trouve géniale
À l’heure où l’on parle en permanence d’enlèvements, Sylvie est une mère qui a eu une idée astucieuse . . . À méditer pour les parents et grands-parents qui ont en charge des enfants !
Un jour, alors qu’elle sort de l’école, Mélanie ne voit pas sa mère. Elle cherche un peu partout du regard mais personne de sa connaissance n’est présent.
C’est alors qu’un homme bien habillé s’avance vers elle et lui dit : « Ta maman est en retard, elle a eu un empêchement de dernière minute et ne peut venir te chercher. » Mélanie regarde l’homme d’un air interrogateur. Elle lui demande : « Le mot de passe ? »
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L’homme rigole et lui dit : « Mais c’est quoi cette histoire de mot de passe ? Allez, viens ! » Mélanie se sauve alors en courant et rentre à toute vitesse dans l’école en hurlant au secours. Affolé, l’homme, qui ne comprend pas la situation, se sauve à son tour.
La directrice de l’école, venue au secours de Mélanie, lui demande de raconter son histoire : Mélanie dit alors : « Maman m’a donné un mot de passe. Elle m’a dit que si une personne me demande de venir avec elle et ce, même si je la connais, mais qu’elle n’a pas ce mot de passe, il faut que je m’enfuie en courant. Et c’est ce que j’ai fait. » Sa mère lui a sauvé la vie . . .
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Elle a donc donné un mot de passe à sa fille en lui expliquant que, si elle avait un empêchement, elle donnerait ce mot de passe à la personne qui viendrait la chercher à l’école ou au sport.
Elle lui a également dit de crier au secours et de se diriger vers des personnes de connaissance ou dans un magasin.
SVP, faites circuler l’astuce ! Merci pour les enfants !
une plante piétinée peut, oui, en devenir infertile ; mais la plante n’est pas infertile en soi — il faut juste bien regarder où on met les pieds !
Je suis heureux de voir que quelque chose semble « débloquer », depuis mes « observations », mais . . . il ne faudrait pas simplifier ce blocage, je crois, en mettant tout le blâme sur « la lettre » ou « la distance » seules.
« L’esprit » dans la lettre n’est qu’une image, bien sûr. — C’est dans les lecteurs que cet « esprit » vit — ou alors reste mort ; et c’est dans ceux qui écrivent qu’il se forme et mature, avant que d’être couché sur le papier — dans une boucle de rétroaction qui n’est pas à négliger. ^^
Il demeure cependant que c’est tout un art, que celui de savoir, sur une surface, bien poser ses vers et ses pieds, comme sa prose — en prenant garde non plus de s’enfarger dans les fleurs du tapis, qui sont, elles, essentiellement stériles, c’est bien entendu.
Je souhaite que nous travaillions cet art, mon ami, et comme il se doit, et, oui, même avec des mots, et même entre amis —, à qui l’on se doit tout de même parfois de dire trois ou quatre vérités bien senties, n’est-ce pas ? Qui d’autre saurait le faire avec la qualité, le doigté, le ton, les mots justes ?
Blâmer les mots eux-mêmes, ce serait un peu cheap-shot, non ?, nous qui savons jusqu’à en créer lorsqu’ils nous font défaut.
Bien sûr, cela est . . . plus facile à dire qu’à faire ! ^^ . . .
Même si tu prétends le contraire !
Allons, je te taquine un brin. Mais ne l’écrase pas, ce brin, il est tout fragile encore du dernier passage de tes gros sabots. Laisse-toi chatouiller, cette fois. Enlève-les, ces frustres carapaces ! — et sache rester tendre en tes plantes qui poussent leur chemin . . . vers où ? Vers quoi ? Vers qui ?
Mais vers le ciel bleu, pardi ! Et vers où il te chantera d’aller, de butiner, de jardiner !
Le ciel commence aux orteils : car nous ne sommes pas des oiseaux. Et c’est pourquoi chaque pas compte. Nous pouvons encore nous planter — et rester là, comme lettre morte.
Relevons-nous, alors ! Et infusons l’esprit dans nos pas de danse et d’exploration, de création et de recréation !
Ne soyons pas comme ces oiseaux qui passent avec l’air de ne pas y toucher. Ni comme ces bêcheurs butés qui ne voient rien de la beauté qui les entoure. Ni trop haut, ni trop bas, les jambes qui descendent bien jusqu’au sol — et dans les cheveux une couronne : le feu inspiré qu’y met Le Soleil En Personne.
Bonne route à toi, ami lointain : et que la distance ne t’aveugle pas. Je suis juste là, sous tes doigts, imprimé sur tes rétines et voyageant dans tes circonvolutions tourbillonnantes.
Certaines choses se communiquent à elles-mêmes, dirait-on, en un tout inextricable : l’esprit, la lettre ; l’ami, la tête ; le cœur, le pied, la danse — et la fleur, qui s’en balance !
C’est la grâce que je nous souhaite !
Donne-moi de tes nouvelles, mon cher ! Mon cœur a soif de savoir ce que deviennent mes amis !
Au plaisir de se lire et de s’écrire, donc — en attendant que de se voir dans nos êtres ineffables ! — À bientôt !
When I joined the Intergalactic Quantum Conundrum (telepathically, of course as it is advertised), I became at once better informed about my own discipline, for I wasn’t alone anymore in the distinctly quaint type of magic-doing that the Conundrum’s scattered members favour, which is richly documented, annotated and hirsutely ultralinked in the notoriously hectic Conundrum Anarchive.
I now have scriptures to live by — in a vade mecum kind of way — that are shared by a vast confederation of happy heterodox hermits, now at last duly celebrated and in some manner guided by the first body of literature to efficiently do so since the sketchy and somewhat cynical Dao De Jing.
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Everyone knows that strength lies in numbers, and that the more the merrier.
Yet, I remained mainly alone in my practice, for the quantum conundrum intergalactic community is overall kind of aloof and antisocial, and I seldom ever accomplished with others the occasional missions that were bestowed upon my special idiosyncrasies by the quasi-central quantum strange dispatcher.
I cherish each and every mission, though, that I could thus fold, unfold and utterly pack with truly entangled partners.
My special skills are : off the hizzle ingenious off-road inventivity ; timeless artsy multi-level self-conscious super-deeds ; unpredictable strikes of dubious marbled genius ; and, last but not least, irritable endless patience. I also know how to perfectly sit on my budding laurels without discomfort and from that commanding place consider my infinite writhing, seething and wrangling options, while keeping working hard and without a pause at the more vertuluscious of them, even during my many physicospiritual games.
My main flaw : I am almost constantly elsewhere, so I have some trouble evaluating distances.
Experience-wise, I have programmed and meta-programmed many a thingy, from a sewer-exploration robot to a downright wish machine that actually works¹. I also am the founder of La Tramice, the unknown journal about communication².
I am currently fostering those two foot-noted thingies, and long-windedly try to form teams for working on them with me ; I am also hatching, among many another a-thingy, a comic book, a board game and a novel with which to shovel my kind of coal into the furnace of humanity’s foolish train — in order to make it eventually enter dimensions other than those that tracks and even wheels can bring anyone to. You know what I mean.
I love all dash-board apparatuses, though, be they simple or hairy.
Ask me anything. Literally anything. — I’m an author.
I will also do errands for you, just to see you smile at my strict don’t-give-a-shit-don’t-take-a-shit grave or joyous cunning autonomous fanciful arch articulated selfless glittering person.
You are welcome. I don’t know where, but I am sure you are welcome somewhere, and even awaited.
Office Notes on [Fred Mir]
Real Name : [Frédéric Lemire]
Date of Birth : [September 12, 1969]
Date of Death : [~ Still Computing ~]
Class : [Nerd/Hippy/Poet]
Level : [Early Adopter] — ❁ Premium Privileges ❁
Secret Alias : [Fredavatar]
Il ne sert à rien — c’est en fait totalement contre-productif —, de lancer des anathèmes, de bien opposer la gauche et la droite, de s’injurier ad nauseam : de gauchistes et de droitistes, de racistes et de racialistes, d’inclusifs et d’identitaires, etc, etc, etc. Il y a pourtant un truc, je pense, qui pourrait tous nous mettre d’accord.
Ne pensez-vous pas que, en plus de l’environnement — qui est crissement important, on s’entend —, nous devrions nous concentrer sur le bien-être de chaque personne ?, que cela devrait être notre base et notre focus et ce que nous devrions tous chérir avec tendresse et reconnaissance ?
Mais justement : nous avons tous nos idées sur comment prendre soin des personnes, et c’est là, bien souvent, que nous divergeons.
Mais pas tant que ça, au fond, quand on y regarde de plus près. Nous avons pas mal tous les mêmes besoins et pleurons pas mal tous aux mêmes endroits dans les films qui mettent ces besoins fondamentaux en lumière.
Seulement, aujourd’hui, nous perdons trop notre temps à vouloir nous diriger les uns les autres, plutôt qu’à chacun chacune se diriger soi-même et à s’entraider et à rendre la vie plus belle et harmonieuse sur Terre et dans l’univers. Seulement, aujourd’hui, c’est la division qui règne. Il y aura une « majorité » qui dirigera, et — et puis c’est tout, mis à part tous ceux qui pousseront des hauts cris, le plus souvent en vain. Seulement, aujourd’hui, les divergences sont agrandies, exactement comme dans l’album d’Astérix La Zizanie ― et c’est maintenant la guerre totale entre des extrêmes qui s’ignorent, sauf à se voir en ennemis dûment fieffés !
D’ailleurs, comme je le dis dans mon livre La machine à souhaits(permettez-moi cette petite auto-promotion) :
Et si nous le leur demandions, aux personnes, ce qu’elles veulent ? Et si nous bâtissions la société à partir des personnes ?
Sans oublier l’environnement, bien évidemment.
Et si nous nous dotions d’outils simples ou sophistiqués pour tenir à jour, dans des tableaux de bord personnels, nos rêves et nos aspirations ? (Non, cela n’est pas abusivement individualiste ou égoïste, car bien souvent, c’est à comment nous pourrions nous rendre utiles que nous rêvons !) Nos tableaux de bords nous rendraient en outre des comptes sur l’environnement qui nous entoure (incluant ses habitants), sur ses besoins, et sur ce qu’il a à offrir.
Ainsi, nous pourrions mettre nos énergies à des choses vraiment utiles, c’est-à-dire viablement utiles, et être, tout dispersés et divers que nous sommes, dans un vrai focus de groupe, un focus fractal, permaculturel, holistique, name it — et non pas dans un établissement de combats de coqs avec paris, hauts cris, picossage infini, et ambiance pourrie pour l’harmonie.
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Une des choses qui est un obstacle majeur à ce rêve — qui est déjà partagé par beaucoup, j’en suis certain, et depuis longtemps —, c’est la peur.
La peur est LE moyen de contrôle ultime. On érige des épouvantails pour éperonner les gens dans des directions prédéterminées ; au besoin, on s’érige soi-même en épouvantail en faisant une scène terrible, en ayant recours à une forme ou une autre de violence.
Dans un free for all complet, c’est sûr, il y aurait plein d’abus épouvantables. Du prosélytisme déplacé, des manipulations, des abus sexuels, des vols, etc. Et le gouffre ne ferait que s’agrandir . . .
Je ne dis pas que tous ces travers en seraient éradiqués, mais . . . SI, plutôt que de tenter de nous contrôler les uns les autres, nous nous assurions avant tout que chaque personne soit bien et puisse s’épanouir sans nuire à l’environnement, bien au contraire ? Si c’est à cela que nous consacrions nos énergies, plutôt qu’à nous picosser jusqu’à temps qu’on soit, pour un temps, les vainqueurs ? Mais la vie, notre planète, n’a pas à ressembler à un établissement de combats de coqs. Elle peut être bien plus agréable et profitable, c’est bien évident.
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Bon, me direz-vous, les vainqueurs du moment sont là et nous pourrissent la vie ; c’est bien beau ton rêve, mais, comme dit le vice-président Cheney dans le film Vice (à voir, absolument !), « Le monde est tel qu’il est. Vous devez vivre avec cette réalité : il y a des monstres en ce monde. (. . .) Je ne vais pas m’excuser d’avoir protégé vos familles et je ne vais pas m’excuser d’avoir fait ce qui devait être fait pour que vos proches puissent dormir en paix la nuit. » (Tout ça basé sur un tissu de mensonges et de perceptions tordues.)
Mais, sur un point en effet, il a raison : le monde est tel qu’il est.
Mais si on faisait . . . autrement, sur une base individuelle, et à grande échelle ? Si, plutôt que d’entrer dans le combat de coqs mondial grâce à nos merveilleux moyens de communication modernes, nous les utilisions pour pratiquement, concrètement, tangiblement, nous aider les uns les autres (entre autres en communiquant nos besoins et nos souhaits, et ceux de nos projets) et pour prendresoin, le mieux qu’on peut, du magnifique jardin et terrain de jeu qu’est la biosphère terrestre ?
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C’est entre autres à ça, à l’élaboration de ces outils de communication, que je compte m’appliquer, ici même, sur LaTramice.net, site consacré à la communication que j’ai fondé en 2015. Je vous en prie, envoyez-nous des articles, des dessins, des poèmes, des vidéos, tout ce qui peut se publier sur la Toile — nous avons drôlement besoin de prendre la communication plus au sérieux, elle est un outil tellement merveilleux lorsqu’on l’utilise positivement, avec le bon focus !
— Quelle est cette tristesse qui plane lourdement sur l’arène ?
— C’est celle de l’arène elle-même.
✵
Murs, loges, cantines et guichets ; files, attente et futilités. Variétés. Du pain et des jeux.
Et du sang, des morts, des déchets et de la crasse. Injustices, désespoirs . . .
Ôtons maintenant les murs, les vendeurs de mort et leurs clients, repoussons-les à l’infini.
Restent le calme et le désert.
✵
On imagine le désert vide, mais le désert a aussi son grand calme. Aimer le désert.
Le grand calme du désert, comme celui de la nuit, nous sont au fond et prioritairement nécessaires. Que veut le désert ? Être habité. Ainsi le veut aussi la nuit.
Le désert, en tant que privé de tout, veut tout. Mais vouloir est de trop. Vouloir vide le vide lui-même de son sens.
Savoir est mieux.
Le vide comme espace intérieur est le sens même du vide.
✵
Au milieu d’un désert fort violent s’érigeait jadis une tour, une tour immense et conique, effilée comme une épine. Les grains de sable, innombrables, déterminés, s’en disputaient furieusement le sommet. L’extérieur, au fil des siècles, a ainsi été poli, usé et finement troué de dentelle par ce combat abrasif.
En l’intérieur, obscur, œuf échographique scintillant d’activité, sur plusieurs paliers pourtant éclairés et reliés entre eux par un réseau d’escaliers, la vie sans compétition, celle qui nous traverse et que nous ne retenons pas, celle qui circule, pétille, monte et descend, perpétuellement.
✵
Ô, calme profond du vide, de l’intérieur même des choses, ô symphonie de la fluidité, traverse tout — et règne !
Règne comme règnent l’écoute et la parole dans le dialogue. Règne comme — et avec — ce qui est.
Avec.
Puis, permets des sauts dans ce qui est encore inconnu.
Alors la vie renaîtra et foisonnera comme jamais encore auparavant.
✵
En toi, désert, je marche, plante ma tente et suis à l’écoute, me prépare et suis attentif. En toi je fais et goûte le thé, l’amour et le jardin improbables. En toi, qui n’a pas de murs, je suis libre. En toi seul pouvons-nous nous rencontrer véritablement.
Cesser le combat.
Être.
Régner.
Et rêver ensemble.
✵
Bonne nuit devient bon matin.
Midi n’est pas un sommet. Le soir n’est pas la fin. Ce ne sont que des moments, des configurations du présent.
✵
Le sommet de l’escalier spiralé de nos paroles est le sommet de tous, si tous les ont suivies.
Personne n’est insulté s’il n’y a pas de sultan. Tous et toutes, en cercle, voyagent ensemble, immobiles.
Les caravanes rayonnent et bifurquent mais reviennent aux oasis. Elles explorent mais reviennent à la maison écrire et partager leurs mémoires, écouter d’autres récits.
Elles isolent un temps les perles dans leur files, mais toutes sont reliées cependant, dans le nacre moiré de leurs cœurs, de leurs mains, de leurs pieds, de leurs heures.
Dans la nuit, apparaissent une infinité d’étoiles : c’est nous. Dans le désert, nous apparaissent notre présence, notre silence et notre écoute. Dans nos voix, nos multiples chemins.
On parle un peu partout d’indépendance des peuples, souvent même de façon très stratégique, afin de trouver comment les dégager des carcans qui les enferment, mais aussi, déjà, comment les rassembler, les unir, ces fameux peuples, en actions fondatrices d’eux-mêmes.
Pour commencer, je suis le premier à être d’accord pour dire que plus petit, c’est mieux. Et en réseaux.
Mais combien plus petit ?
Et . . . si le dénominateur commun était l’individu ? Et si c’était là ce qui nous unissait ?
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Le subjectif a longtemps été mis de côté par une science qui se voulait unique de par son objectivité mais qui a négligé le fait que la réelle objectivité inclut aussi les subjectivités.
De même le moi est-il devenu, sous la plume de moralistes douteux, égoïste par nature. Et l’individu — passible d’individualisme, bien sûr, chose impardonnable !
La politique telle que pratiquée aujourd’hui dans la plupart des parlements du monde est . . . intéressante . . ., mais . . . comme il peut être intéressant de regarder par le mauvais bout d’une lorgnette ; les gens vus à travers elle semblent tellement petits !
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Si la société actuelle est si divisée, n’est-ce pas, peut-être, justement parce qu’on prend la lorgnette par le mauvais bout ? Qu’on pense ne pouvoir assurer aux individus la sécurité qu’à travers un « État », archétype du groupe uni, « civilisé » — mais aussi rendu inerte et, de là, corruptible ? Ne faut-il pas, au contraire, pour obtenir des associations qui soient véritablement libres et significatives, et surtout vivantes, partir, fondamentalement, des personnes qui en sont constitutives et tenancières et leur donner les outils de navigation et de tramage des constellations sociales de demain ?
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Dans la grande société où je m’imagine vivre heureux un jour, j’aurais un juste pouvoir sur ma vie, je pourrais, mieux qu’actuellement, y planifier mes expériences, mon parcours, bref, ma destinée. Ce serait une société de proximité où mon entourage serait le fruit de choix identiques ou réciproques. Ma vie, pour ainsi dire, y serait enchâssée dans une continuité constamment communiquée et optimisée (agencée et réagencée localement), constituée de modes de vie divers, respectueux les uns des autres et, avant tout, . . . des personnes.
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Les peuples véritables sont, il me semble, subordonnés à l’individu, aux individus, et non l’inverse. Un véritable peuple ne pourra émerger, me semble-t-il, que de la libre association d’individus qui se seront mis ou trouvés d’accord dès le départ, avant même la formation de chacune de leurs associations — et qui peuvent changer d’association ou se réagencer à tout moment.
Cette vision — qu’on pourrait appeler la façon perso — a l’avantage de pouvoir séduire la pensée que j’entends à gauche selon laquelle on ne doit laisser personne derrière — de même que celle que j’entends à droite, qui encourage la réussite individuelle.
Pourquoi d’ailleurs la réussite individuelle devrait-elle se faire au détriment d’autrui ? Il y a bien sûr d’autres façons de faire, plein de façons de faire, et du gagnant-gagnant, à part ça ! La beauté de fonder la société sur la personne, c’est que ça institue de facto une justice universelle : si on prend soin de chaque personne et de ses rêves, on la protégera du même coup de ce qui peut lui porter préjudice.
D’aucuns trouveront cela radical ; je ne les contredirai pas : je souhaite en fait voir neutralisées, voire rendues obsolètes les racines corrosives de la doctrine qui veut qu’il y ait des gagnants et des perdants : le décapant capitalisme.
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Soit dit en passant . . . On dit la droite individualiste, mais elle mène souvent à du collectivisme ! Une grosse compagnie dont tous les profits vont au sommet de la pyramide hiérarchique, cela ne vous rappelle-t-il pas, étrangement, les sociétés d’insectes ?
Et une fourmi, . . . c’est pas ce qu’il y a de plus individualiste, quoiqu’en dise la fable !
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Mais revenons à nos moutons. Les peuples qui acquièrent leur indépendance, délimités par des frontières plus ou moins arbitraires et des constituants plus ou moins passifs, accoucheront de peuples sans doute plus significatifs que la masse dont ils s’extraient, mais ils resteront compromis à proportion de leur immensité même. Autrement dit, leur unité sera d’autant plus factice qu’ils seront populeux.
Les étages décisionnels, la représentation des masses, les agglomérations, les cloisons, les comités, les sous-comités, la mauvaise communication, les tentations et les menaces venant de groupes occultes, la corruption, la dictature de la majorité pour commencer (fût-elle une majorité très forte) : autant de bris dans le tricot social qui finira à la longue par tout se détricoter et s’emberlificoter.
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Qu’il soit impératif de former une unité à aussi grande échelle est une vision qui date, telle est mon impression du moins, du temps des royaumes, lesquels avaient besoin d’armées, de champs de ci, de ça, d’industries, de main d’œuvre en masse . . .
On n’a pas besoin de tout ça pour vivre. Ça peut être beaucoup plus simple. Les fruits poussent, on les cueille, on se fabrique des maisons, on va au magasin acheter de l’encre et du papier, on échange avec ses voisins, on s’apprend des trucs, on s’amuse et on rigole comme on peut — parfois même plus —, on prend soin les uns des autres et de nos forêts, nos lacs, nos jardins, nos ateliers, nos œuvres, on communique . . .
Qu’a-t-on besoin des armées ? Des polices ? Des « gouvernements » dont l’hégémonie s’étend sur d’énormes territoires ? Qui jouent gros et dur, à leur titanesque niveau, sur la scène internationale ? (Jeu, fort malheureusement, que presque tout le monde joue, à différents degrés, en ce début de troisième millénaire qui à la fois s’éveille, prétendument, et tout aussi assurément court à la catastrophe. — Que va-t-il se passer ?)
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Même la gauche mainstream, cette gauche qui se dit pourtant progressiste, jusqu’à maintenant, a surtout maintenu l’attention sur le fait que la solution passait par le groupe, par leregroupement, et ne s‘est attardée que très discrètement, que très abstraitement, voire négativement ou de façon réductionniste, à l’individu, c’est-à-dire en tant que masse ou catégorie : « les pauvres », « les travailleurs et travailleuses », telle ou telle minorité, le peuple, etc.
J’ai peur que l’on passe ainsi — et un peu trop vite — à côté de quelque chose d’essentiel et de primordial, philosophiquement parlant : la personne.
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Les dauphins, les chiens, les éléphants sont-ils des personnes ?L’être sensible, bien entendu, est au cœur de cette primauté et mérite reconnaissance. Nous pourrions peut-être nous entendre pour entendre par le mot de personne : « être communicant » ; cela s’accorderait en tout cas avec l’étymologie du mot, car :
(. . .) « personne » vient du latin persona, terme lui-même dérivé du verbe personare, qui veut dire « résonner », « retentir », et désigne le masque de théâtre, le masque équipé d’un dispositif spécial pour servir de porte-voix.
universalis.fr/encyclopedie/personne
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Il me semble évident que les associations d’individus — entre toutes les choses qu’il est possible de faire — se doivent d’être bien faites, c’est-à-dire en ce cas par le libre et préalable assentiment des individus eux-mêmes, éclairés des possibilités imaginables et des limites empiriques.
Aller dans l’autre sens, prendre par exemple un ensemble X d’individus (vivant sur un territoire Y, mettons) et établir qu’une majorité Z dictera la norme, c’est, il me semble, rater la cible de très loin. C’est se condamner à considérer les personnes comme des troupeaux qui doivent être guidés et . . . exploités. Mais nous faisons bien plus que peupler, ici-bas ! Nous tissons, nous tressons des relations qui, mises toutes ensemble — constituent ni plus ni moins que le monde !
Nous ne percevons pas tous aussi bien cette contradiction, mais, depuis la venue des réseaux sociaux, nous la percevons de mieux en mieux — malgré les tentatives désespérées du vieux système pour se maintenir, à coups de mensonges, de propagande, de cancèlations et de frayeurs montées de toutes pièces.
Mais le vieux système hégémonique pourrait tout aussi bien se rompre net sur cette ligne de faille même, de par l’éclosion d’outils et de pratiques qui remettent l’individu au centre. Tous les individus.
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L’individu, la personne, toutes ses possibilités, finies et pourtant infinies, ses merveilleuses et tragiques sensibilités, son histoire live, n’est-ce pas ce qu’il y a de plus fascinant, attendrissant et potentiellement grandiose ?
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Il me semble bien que si on partait de l’individu plutôt que de la collectivité, on aurait une base beaucoup plus solide, d’abord plus riche, plus multicolore, mais aussi moins abstraite, et, on l’imagine, plus compatissante, plus ouverte. Évidemment, il s’agira d’informer les individus des sociétés mouvantes et clignotantes qu’ils forment réellement et potentiellement entre eux.
Tout en respectant certaines limites, il s’agit, n’est-ce pas ?, d’optimiser nos rêves (il faut bien sûr s’épanouir sans nuire à autrui ; cela demande tout de même un peu de vue d’ensemble : d’écoute, tout d’abord, de sensibilité, mais aussi d’audace, d’imagination, une certaine sobriété, une bonne diète multidimensionnelle, ainsi que de l’ingéniosité ; et s’épanouir absolument sans autrui, jamais, ce serait quand même un peu dommage, non?) ; de répondre aux besoins, avant toute chose ; puis de voir aux souhaits ; nous regrouper sciemment et fluidement selon des paramètres établis par chacun et chacune de nous ; que nos choix, incidemment, ne nuisent pas à autrui, aux autres communautés ni à l’environnement . . . ni à . . . (De combien de règles d’or avons-nous besoin, au fait ?)
La façon perso, hein ? — Une approche qui change de l’individualisme ironique !
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Mais admettons un instant que cela serait, nos enfants continueront encore quelque temps de naître dans des sociétés qui ne leur ressembleront pas nécessairement et ils se retrouveront dans des situations assez semblables à celles que nous connaissons actuellement, avec leurs structures préétablies et tout ce qui en découle : frustration, exclusion, rébellion, etc.
C’est pourquoi, je pense, il faut garantir à tous, et dès l’enfance, une immunité individuelle inaliénable. Ce serait le rôle de l’école ou de l’asternelle d’offrir un lieu propice à l’exploration, à l’orientation et à l’expérimentation auprès de guides-accompagnateurs. S’assurer aussi que les outils de navigation, protocoles, langues, codes et interfaces, ce dont est tissé le monde de l’ère communicationnelle, soient bien compris et maîtrisés par chacune et par chacun.
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Renverser la tendance. Plutôt que de nous apprendre à obéir — d’abord aux parents, puis aux professeurs, puis aux employeurs, le tout constamment encadré par les lois écrites et non écrites —, si, au lieu de ça, nous nous apprenions plutôt à découvrir les possibilités qui nous sont offertes, selon nos aptitudes naturelles, nos rêves et nos aspirations, capricieuses comme profondes ?
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En Islande, en Écosse, au Québec et en France, un peu partout de par le cosmos, on tripe sur l’idée d’écrire des constitutions.
Je me demande si on a déjà — sûrement que oui, à travers tout le Cosmos ! — songé à établir dans une constitution la nécessité d’un solide système de communication qui permettrait de soutenir chaque individu dans la construction et les métamorphoses de sa vie ?
Nous sommes ingénieux. Ce n’est pas un défi au-dessus de nos forces que d’établir un tel système ; ce pourrait même être généralement fort agréable !
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Bien sûr, les habitants d’un même territoire — d’une même planète, mettons — devront se mettre d’accord entre eux quant à l’utilisation des ressources et au maintien de la santé de l’environnement à tous niveaux.
Imaginons un instant une « ère communicationnelle » où il y a des outils autodocumentés que des êtres divers et changeants utilisent pour optimiser leurs interactions et l’usage de leurs ressources, lieux d’habitation, etc. ; où chacun-chacune peut littéralement concevoir son propre environnement durable ; où l’on est également en mesure de naviguer aussi librement que possible entre ces environnements ; et où, dernières mais non les moindres, des écoles et des « retraites » fournissent des lumières quant à l’élaboration, adaptée pour chacun et chacune, de voies menant à n’importe quel⸱le : environnement, activité, personne ou chose, existant⸱e ou possible.
Je pense en fait que si chaque environnement, aussi local et aussi unique puissions-nous l’imaginer, était littéralement choisi par ses constituants, chacune et chacun d’entre eux, et ne causait pas de dommage aux autres environnements — la règle d’or appliquée aussi aux associations et aux communautés —, on se sentirait bien mieux sur cette planète.
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Aussi onirique que ce portrait puisse sembler en ce monde d’aujourd’hui qui semble aller à sa ruine, est-ce que l’idée d’un monde communicationnel et émergent n’est pas à tout le moins une avenue intéressante à hardiment, sérieusement, considérer et tenter ?
En fait, si nous ne nous entre-détruisons pas complètement avant d’arriver à le mettre en place, ce monde communicationnel, nous disposons sans doute, sur cette planète particulière du cosmos, de beaucoup, beaucoup de temps pour perfectionner et diversifier une sorte de permaculture multidimensionnelle intégrée, émergente, ouverte, viable, globale, sans oublier bariolée, veillant à l’innovation, au maintien, à la rescousse, à la contemplation . . .
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Les véritables peuples sont unis. Les véritables peuples foisonnent et sont divers. Ils ne sont pas nécessairement grands et se trouvent d’ailleurs mieux petits. Ils s’associent et se réassocient constamment ; ils évoluent, librement, diversement. Solidement et fluidement. En toute intégrité, en toute conséquente fluidité éclairée. Bien sûr, ils doivent se communiquer, disposer d’outils communs, ou du moins d’un « protocole d’arrimage communicationnel » . . . c’est-à-dire, à la base, se parler et s’écouter, tout simplement.
Il m’apparaît comme une évidence qu’il serait en fait très intéressant de nous doter d’un système qui veillerait au bien-être et au développement de chaque individu, de lui tendre la main, de l’aider au maximum dans son autodétermination, son développement, ses forces et ses loisirs. Plus, si affinités.
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L’arrivée de l’internet a ouvert une fenêtre sur une ère de nouvelles possibilités sur le plan des communications. Il faudrait peut-être s’empresser de saisir cette occasion pour retisser la société par la base à l’aide de ce puissant outil — avant que la fenêtre se referme !
Cela peut se faire sans l’internet, bien sûr (et ça serait sans doute moins rasoir, tiens : un internet en carton ?), mais le feu est pris dans la baraque et une solution rapide doit être prise. Les temps sont plus que mûrs !
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Tout système aura contre lui sa propre étroitesse. Mais un système qui vise le bien-être de tout individu peut-il être appelé étroit ? N’est-ce pas au contraire l’élargissement que tout individu attend ? À quand une belle unanimité là-dessus ?
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Il est dans la nature du « pouvoir sur » de dominer, de contrôler, de standardiser, d’uniformiser, de limiter, de robotiser, bref, de déshumaniser afin de pouvoir utiliser, voire détruire, jeu auquel il n’y a pas vraiment de gagnants. Nous pouvons faire bien mieux que cela en cultivant et libérant le « pouvoir de ».
Un certain « pouvoir » s’est concentré dans les mains de quelques-uns. Mais le pouvoir est une chose à réexaminer. Qu’est-ce exactement ? Qu’est-ce, sinon ce que nous pouvons de meilleur ? Mais bien sûr !
Il s’agit donc, individuellement et collectivement de trouver comment. — Essayons, à tout le moins !
Julian leva les yeux de son rapport annuel d’impôts. Un son inattendu avait vibré, juste là, tout près. Ça tenait à la fois d’un bruit de haute tension électrique et de celui d’une fermeture-éclair qu’on ouvre. Et, effectivement, à environ un mètre et demi devant ses yeux ébahis flottait, sans support apparent, une espèce de braguette trans-dimensionnelle contrastant nettement avec le mur derrière elle.
L’ouverture s’agrandit, ondula, et Julian vit avec stupeur une sorte de pieuvre-mutante en sortir avec quelque difficulté. La créature épousseta ses tentacules et en tendit diplomatiquement un vers Julian. Trop incrédule pour avoir peur, Julian le prit et le serra tout aussi courtoisement.
— @∑•··Ÿ ¿, dit la créature.
— … Moi de même !?, hasarda Julian.
— ! hÄ, FrañssÉss ?, se ravisa la créature.
— Mon nom est Julian, dit Julian, en espaçant bien chaque mot.
— MóÂ, c’ëSt Bü-Ww, dit la créature en rejetant coquettement ses cheveux sur le côté.
— … !!!
Bü-Ww promena un regard curieux aux alentours, fit quelques … « pas » dans la pièce, jaugea sommairement le mobilier, gratta pensivement une de ses nombreuses aisselles et revint tranquillement vers Julian.
— Comment s’appeler, ici ? (Nous vous ferons grâce un instant de son insupportable accent.)
— Emm… La Terre ! …La planète Terre ! …
— Non, pas ce niveau, pas planète. Où, ici ?
La créature frisa trois tentacules dans un geste semi-circulaire que Julian interpréta comme voulant désigner la pièce.
— Euh… c’est ma chambre… 13, Barcley Street, cinquième éta…
— Non, non !, s’énerva franchement Bü-Ww en bondissant d’impatience, « Où ICI ? Quoi nom ? »
Cette fois-ci, la créature fit un geste plus large, étendant ses tentacules avec exaspération aussi loin qu’elle le pouvait en faisant de grands cercles.
Julian hésita.
— La Terre tourne autour du soleil, dans le syst…
Notre pieuvre mutante trépigna, se mit à gonfler les joues et à noicir d’une façon menaçante ; elle crispa deux tentacules devant elle et mima, en miniature, et très intensément, presque rageusement, un Big-Bang suivi de plusieurs milliards d’années.
— Bon, bon !, s’apeura Julian. « Le plus que je puisse dire, c’est qu’on est … dans le cosmos, l’univers, le… l-la… — enfin… »
La créature se calma, recouvra sa teinte gris-vert et prit même un air aimable, puis sortit de nulle part un petit calepin écorné et se mit à en tourner patiemment les pages ; chacune d’entre elles était chargée de colonnes de hiéroglyphes soigneusement tracés. Bü-Ww produisit un crayon, le tailla minutieusement avec son joli bec nacré et se mit à écrire avec application.
— Ú-ñÑÍ-vëHrrrs. Vô-Âh-lâhhH !
Bü-Ww hocha la tête avec contentement, referma son carnet, l’empocha — remonta dans la fente et lança un joyeux « Mëërtsi bÿôkWoo ! », avant de se zipper dans l’au-delà.